La prise de ris (verbes associés : « prendre un ris » ou « ariser une voile ») consiste à réduire la surface d'une voile en la repliant en partie : l'objectif est d'adapter la surface de la voilure à la force du vent lorsque celui-ci forcit,. La voile est réduite en la repliant généralement sur la bôme (sur la vergue sur un gréement carré de la marine ancienne). Sur un voilier moderne cette manœuvre concerne la grand-voile ; la voile d'avant étant soit enroulée, soit remplacée pour répondre à la même situation, à l'exception notable du solent à ris.
La poussée exercée sur la voile est proportionnelle au carré de la vitesse du vent : lorsque le vent forcit, la force de propulsion augmente donc rapidement mais également, sous certaines allures, la gîte et la violence des réactions du gréement à toute fausse manœuvre. En particulier au près, si la surface de la voilure n'est plus adaptée à la force du vent, le voilier réagit en gîtant de manière excessive et en venant bout au vent dans la moindre survente. Si le vent continue de croître, plusieurs manœuvres de réduction de voilure peuvent être réalisées successivement (généralement 3 dans un gréement moderne); les prises de ris se font pour le premier ris vers 15-20 nœuds de vent, le deuxième ris entre 20 et 30 nœuds de vent, le troisième ris entre 25 et 35 nœuds de vent. Ces chiffres indicatifs sont très variables d'un modèle de voilier à un autre.
La prise de ris est une manœuvre délicate, en particulier sur les anciens gréements, car elle doit être réalisée en partie dans des zones exposées - au pied de mât sur certains voiliers modernes, dans la mâture sur un gréement carré - alors que les conditions se sont dégradées : bateau ballotté par la mer, voiles et gréement secoués violemment par le vent, gîte importante, pont balayé par les vagues. Sur les voiliers modernes toutefois, prendre un ris est souvent une manœuvre relativement simple : soit la voile est équipée de « ris automatiques » qui permettent en tirant sur des bouts depuis le cockpit de réduire sa surface en étarquant les points d'amure et d'écoute de la bande de ris, soit, dans le cas d'une grand-voile sur enrouleur, il suffit de donner quelques tours à l'enrouleur placé dans la bôme ou dans le mât.
Quand on ne dispose pas de système de ris automatique ou d'une grand-voile à enrouleur, la manœuvre de ris comprend les étapes suivantes :
La manœuvre pour larguer les ris se fait dans l'ordre inverse de la prise de ris :
On peut retarder la prise de ris si la survente est jugée passagère (rafale), mais si le mauvais temps s'établit cela peut accroître le risque d'ennuis futurs : il faudra alors de toute façon réduire mais dans des conditions de mer plus difficiles. Un barreur expérimenté peut tenter de maîtriser le bateau devenu surtoilé, mais au prix de zigzags dus à la perte de contrôle partielle du voilier durant les surventes ou au passage des vagues. Les solutions provisoires habituelles sont :
Sur les gréements modernes, une fois tous les ris pris, si le vent forcit encore on peut hisser une voile dont le grammage, la forme et la surface sont adaptées aux conditions de vent extrême : la suédoise. Elle était plus répandue jusque dans les années 70.
La réduction de voilure ne doit pas se traduire par une augmentation du creux global, ce qui aurait pour effet d'aggraver la gîte. En particulier, sur des gréements divisés 7/8 ou 3/4 non munis de bastaques, réduire la grand-voile peut diminuer la raideur de l'étai, le pataras étant bien moins efficace dans ce cas que sur un gréement en tête. Le creux de la voile d'avant augmente et il sera souvent plus logique, avant d'ariser, de passer à un gênois intermédiaire plus lourd ou à un solent, voire plus tard à un foc ORC. On peut retenir la formule : réduire devant (le mât), aplatir derrière. Un inconvénient du génois sur enrouleur est que partiellement roulé il n'est pas possible d'étarquer son guindant et qu'ainsi il reste trop creux. Une voile d'avant endraillée sur étai largable est alors une excellente solution. Quelle que soit la configuration, la réduction de voilure doit rendre le bateau moins ardent et éventuellement plus rapide.
Les effets néfastes de l'augmentation de la vitesse du vent sont particulièrement importants du près au travers car à ces allures une partie de la poussée exercée contribue à faire gîter le bateau. Aux allures portantes, l'augmentation de la poussée se traduit sur certains voiliers modernes par une augmentation de la vitesse : le bateau déjauge et peut partir en longs surfs sur les vagues. Un voilier, bien manœuvré, pourra conserver ainsi toute sa voilure alors qu'au près il aurait déjà pris son deuxième ris. Le risque fréquent associé aux allures portantes - le départ au lof - est toutefois amplifié et sa brutalité peut coucher le bateau avec risque d'homme à la mer. Bien plus dangereux est le départ à l'abattée car il entraîne souvent un empannage très violent. L'autre risque, non négligeable, est de voir le bateau sancir, quelquefois avec l'action combinée d'une grosse vague prise sur l'arrière. Ceci est observable facilement sur les catamarans de sport dont les entrées d'eau sont particulièrement fines.
Sur les voiliers anciens, pour réduire la voilure, on commençait par amener les voiles situées en hauteur (cacatois, perroquet) qui contribuaient par leur position à faire gîter le voilier et exercer une forte pression sur son gréement, puis la réduction était progressivement étendue aux voiles les plus basses. Seules les grand-voiles et les huniers étaient munis de bandes de ris qui renforçaient les points d'attache des garcettes. Le premier ris, le plus près de la vergue était appelé le « ris de chasse », le plus bas était le « ris de cape » qui n'était pris que lors des tempêtes. Avant d'aborder les zones de vent fort tels que les Quarantièmes rugissants, la partie haute de la mature (mat de perroquet, flèche de cacatois) était dans certains cas démontée.
Il va sans dire que la prise de ris sur les gréements à traits carrés était une manœuvre comportant des risques, car les gabiers devaient grimper sur les vergues, par mauvais temps, pour serrer la toile et que, jusqu'à la fin de l'ère commerciale de la voile (dans les années 1920) les gabiers ne disposaient d'aucun équipement individuel de sécurité et pouvaient soit tomber à la mer (très peu savaient nager et de toutes façons la complexité d'arrêter un navire ancien à la cape et d'affaler une chaloupe de sauvetage par mauvais temps rendaient la tentative illusoire, voire dangereuse pour le navire) ou bien s'écraser sur le pont .
Les risques étaient encore multipliés sur les navires commerciaux rapides du XIXe siècle, les clippers, qui étaient menés "pied au plancher" comme des voiliers de régate pour maximiser les bénéfices.
À bord des navires-écoles ou des répliques modernes de navires anciens comme la Frégate l'Hermione, les gabiers, souvent des amateurs et des bénévoles, subissent un entrainement rigoureux et portent des baudriers de sécurité inspirés des équipements d'alpinistes pour limiter ces risques au maximum.